Déconfinés, la république en moins

Le 25è jour, soit le 10 avril 2020, j’ai publié mon dernier billet de confinement, alors que nous étions encore loin d’an avoir fini. Je ne trouvais plus le temps de revenir au blog, dépassé de toutes parts par les cours et ateliers qui se poursuivaient, à distance, avec des étudiants souvent meurtris de ne pas pouvoir sortir, de n’avoir plus de vie sociale, de vivre à l’étroit dans leur chambre ou studio, de se débattre avec leur matériel informatique personnel, avec leur propre forfait téléphonique pour suppléer les carences structurelles de l’université.

De nôtre côté durant tout ce temps : Etre là pour les étudiants, au delà des heures de cours, préparer, anticiper, tester, corriger, conseiller, se démêler avec les problèmes de plate-formes, de connexion, de droits, de manque cruel de moyens, de plate-formes institutionnelles qui répondent aux abonnés absents, renseigner les questionnaires, les formulaires d’évaluation des effets de la crise, faire des scénarios de rentrée, présentiel, hybride, à distance ? Bouillir de ne pas pouvoir sortir manifester notre colère dans la rue. Faire le gros dos, encaisser. Fermer sa gueule.

Confinés et pas aidés, sans masques, faut-il le rappeler. Tant qu’a duré la pénurie, ils n’étaient pas nécessaires puisque l’incurie du gouvernement nous avait conduit à ne pas en avoir de stock. Ils le sont maintenant que l’on peut en acheter, et sous la menace d’une amende de 135 euros, mais ils ne sont toujours pas donnés gratuitement à tous, en particulier aux élèves et aux étudiants, à l’heure où les grandes entreprises continuent de distribuer des dividendes indécentes à leurs actionnaires et de licencier des personnels après avoir reçu les aides gouvernementales de solidarité durant le confinement. Les masques seraient donc trop chers. Trop chers payés pour assurer la protection que tous et toutes méritent. Il y a un moment où la colère ne gronde plus mais où elle éructe, crache, avec une violence inconnue, comme celle d’un volcan se libérant d’une pression trop longtemps contenue.

Cinq mois ont passé, nous sommes déconfinés mais en sursis, même si nous avons pu mener à bon port tous nos étudiants en juin dernier, même si nous avons pu passer un été presque normal, tests covid et mesures barrières à l’appui. Début septembre, on aurait pu penser qu’on allait reprendre le train de la croissance, comme si de rien n’était, qu’on allait tous ré-adhérer au mirage du progrès, qu’on voudrait tous de la 5G pour Noêl, pour être sûrs de ne pas vivre comme des Amisch. Qu’on ne se formaliserait pas du fait que notre président remette Mehmet Yalcin, kurde, demandeur d’asile politique en france à Erdogan au mépris de la convention de la Convention des droits de l’homme et de la Convention de Genève sur les réfugiés, et qu’il le fasse faire par des policiers français, aidés par des agents des services secrets Turcs.

Nous sommes en fait en train de vivre « l’apocalypse » derrière nos masques, c’est-à-dire ce moment de « révélation de ce qui était caché », celui où le masque de LREM tombe, et dont le juste nom apparaît au grand jour : La République En Moins.