L’expérience de l’ouvert

Joseph Beuys, “I Like America and America Likes Me” (Performance, 1974) – photo Tisdall, Caroline, and Joseph Beuys. London: Thames and Hudson, 2008. Print – © et droits réservés

 

 » Ecrire c’est se faire l’écho de ce qui ne peut cesser de parler, – et à cause de cela, pour en devenir l’écho, je dois d’une certaine manière lui imposer silence. J’apporte à cette parole incessante la décision, l’autorité de mon silence propre. Je rends sensible, par ma médiation silencieuse, l’affirmation ininterrompue, le murmure géant sur lequel le langage en s’ouvrant devient image, devient imaginaire, profondeur parlante, indistincte plénitude qui est vide. Ce silence a sa source dans l’effacement auquel celui qui écrit est invité. Ou bien, il est la ressource de sa maîtrise, ce droit d’intervenir que garde la main qui n’écrit pas, la part de lui même qui peut toujours dire non et, quand il le faut, en appelle au temps, restaure l’avenir. » Maurice Blanchot, L’espace littéraire, Gallimard, Folio/Essais, p. 22

 » … l’art est expérience, parce qu’il est une recherche et une recherche, non pas indéterminée, mais déterminée par son indétermination, et qui passe par le tout de la vie, même si elle semble ignorer la vie. » ibid, p. 108

 » Si le poète est vraiment lié à cette acceptation (de se laisser pénétrer par « le tout de la vie », dans « une acception résolue » ndla) qui ne choisit pas et qui cherche son point de départ, non pas dans telle ou telle chose, mais dans toutes les choses et plus profondément, en deça d’elles, dans l’indétermination de l’être, s’il doit se tenir au point d’intersection de rapports infinis, lieu ouvert et comme nul où s’entrecroisent les destins étrangers, alors il peut bien dire joyeusement qu’il prend son point de départ dans les choses : ce qu’il appelle « choses » n’est plus que la profondeur de l’immédiat et de l’indéterminé et ce qu’il appelle point de départ est l’approche de ce point où rien ne commence, est « la tension d’un commencement infini » – l’art lui-même comme origine ou encore l’expérience de l’Ouvert, la recherche d’un mourir véritable. » ibid, p. 200