Dix jours ont passé

Dix jours ont passé. J’ai rencontré beaucoup de personnes, qui m’ont été présentées par Ting. Parmi elles, quelques étudiant-e-s qui suivent le programme français de e-art où je suis en résidence. Ils-elles ont souvent terminé leurs 4 ans d’études à CAA (China Academy of Arts) de Hangzhou, plus rarement issus de l’équivalent de nos BTS dans l’un des domaines des beaux-arts. Ils-elles ont tous le projet de rejoindre une école d’art et de design en France ou y sont déjà acceptés et en attente de les rejoindre à la rentrée de septembre. Tous montrent le désir de connaître et découvrir ce qui fait la spécificité de l’approche des arts en France, qui je m’en rends compte chaque jour, jouit en la matière d’une grande attraction. Les premières rencontres montrent un travail déjà très mature chez la plupart d’entre eux, ils veulent avancer dans leur méthode de travail, de recherche et d’expérimentation à partir de leurs travaux et questions en cours. Ce sera notre programme dans les grandes lignes pour le mois de juin. En juillet, je leur proposerai un workshop sur les écritures éphémères, médias libres.

Et puis j’ai rencontré quelques enseignants de CAA, en Intermédia, dans lequel on trouve les dispositifs ayant recours à des machines ou machineries, au numérique, à la réalité virtuelle, en Photographie, dans lequel on trouve outre l’approche photo centrale, la vidéo, en Public Art, dans lequel on trouve les arts de l’installation dans l’espace public, la performance, et une approche étonnante qui tient selon moi de la réunion de l’anthropologie et de l’approche documentaire, dessinée, filmée ou narrativisée dans la forme, et de la médiation dans la transmission et le travail mené avec le public.

Et puis j’ai rencontré des voisins de quartier, dans la résidence ou village, puisque c’est ainsi que se nomme ce quartier un peu à l’écart de la ville qui gronde sourdement nuit et jour, ce cœur de ville que je peux rejoindre en bus, en vélo, en scooter électrique, en taxi en une vingtaine de minutes.

Parmi ces voisins proches il y a Aaron et Moïse, qui ont une école de musique et magasin d’instruments dont j’ai poussé la porte, pianos de toutes sortes, du bastringue au piano à queue, des guitares, beaucoup, classiques et folk. La première fois j’y ai été invité par celui qui semblait être le patron, Aaron, à prendre un thé, nous avons discuté avec son épouse et leur professeure de musique, un peu en anglais, de Paris, de la musique, de la religion aussi. J’ai compris que c’était important pour eux. Ils m’ont gentiment proposé d’essayer un piano, j’ai risqué mes doigts sur « Avec le temps… » de Ferré, que je joue d’oreille en autodidacte. Puis la professeur de piano a joué, un cantique chrétien, c’était étrange d’entendre, entre ses mains une mélodie qui faisait resurgir des bribes de mon enfance. En partant il m’a demandé mon WeChat. Je n’avais pas mon téléphone avec moi et ne me souvenais pas de mon identifiant, ce qui est à peine concevable ici, où tout se passe sur cette plate-forme. Je repasserait le voir, maintenant que nous sommes voisins.

Quand à mon projet personnel, il n’a pas encore de forme, je suis aux aguets, je capte, je lis, j’écoute, je vois, j’attends, ce moment de suspension est rare, ce blog en est un peu le terreau, l’incubateur pour faire germer quelque chose. Je m’y pose des questions, j’y cherche des formes, des rencontres, d’idées et d’intuitions, je tâtonne, au rythme du temps, souvent lourd car il fait chaud ici.

Parfois, au moment où on le l’attends plus, le vent se lève, il chasse tous les nuages et d’un seul coup, amène l’air frais chasse les particules de pollution du smog. L’air frais, dont nous avons tant besoin. Alors, sortir, parcourir la ville qui commence à s’illuminer, avec ses milliers d’enseignes éclairées, clignotantes ou défilantes, avec ces beaux idéogrammes blancs, jaunes et rouges. Rouges surtout.

« le village » face à l’académie des arts de Hangzhou